samedi 31 mars 2018

carré modeste





Carte 45

Carré en forme de fin de mois + chiffre 7 à cause d’un vendeur déclarant que chaque fois qu’il prononçait le chiffre 6 ses clients entendaient 7 ce doit ça un carré quotidien de 5 passer à 4 ne pas hésiter à revenir en arrière pour rester au présent de l’histoire elle est comme ça la soustraction elle aide le poète à poursuivre sa route au futur même cerné par quatre côtés de même longueur une chambre quadrangulaire ( celle de r.b.) avec un escalier au milieu de la pièce descendant à l’étage inférieur il y avait là une mère et ses 3 enfants sur le quai nous monterions ensuite dans la même voiture on ne dit plus wagon avez-vous remarqué ils étaient 4 voilà mon carré ai-je pensé et la mère ingénieur en électronique avait un accent charmant d’iran peut-être et nous n’avons parlé qu’au présent elle et moi nous souhaitant bon voyage ils (accord masculin féminin)allaient à lyon passer les 3 jours de fête pâques c’est un passage vers le printemps pessah ai-je dit mon sac était rempli (non pas de mots) mais de surprises pour les petits la veille une dame m’avait fait remarquer que j’utilisais beaucoup (trop) l’adjectif petit du geste à la parole elle ouvrait mes livres un par un et disait tenez là et encore ici regardez j’ai fini par lui déclarer que c’était parce que quand j’étais enfant on me disait que j’étais trop grande et l’éditeur à côté de moi r. qui avait suscité l’admiration en nous découvrant son dernier opus lui s’inquiétait de la difficulté pour un typographe comme lui de réaliser en 18 lignes mes fameux carrés

(30 mars)

mercredi 28 mars 2018

Carré 43 Carnage!








Carré 43

Commencera par carnage se terminera par carré c’est comme ça que ça vient écrire en morceaux tout cassés et la langue dites-moi il faut la recoller au gosier pour qu’elle chante et enchante le cours du jour le renard lui s’en fout qui court toujours il est comme ça rebelle et affamé il ne connaît pas cette histoire juive qui dit quand tu as épuisé ton sac de mots il ne te reste qu’à mourir combien on n’en sait rien chacun de nous en naissant en a un nombre limité alors le petit demandera combien on en a l’astuce c’est que tu ne le sauras qu’au moment de prononcer ton ultime parole et là tu comprendras que c’est le dernier mot que tu puisses utiliser le dernier du sac et tu mourras et tous les animaux comment ils font eux qui n’ont pas de mots dans un sac comment je ne sais pas les bêtes sont ignorantes comme nous alors elles ne connaissent ni le mot carnage ni le mot héroïsme elles tuent elles meurent elles naissent ainsi de suite l’ordre importe peu sans les mots exister est une suite de présents puisque le temps n’existe pas sans les adverbes et le temps des verbes je n’en suis pas sûre mais c’est une hypothèse les bêtes vivent chaque jour le même temps lascaux par exemple est une suite de dessins au présent tout se joue au moment du tracé et peu importe si personne ensuite ne voit ce que la main a fait comme à chauvet le rocher obstrue la caverne tout reste au présent ce qui explique notre arrêt devant les parois le carnage finit celui d’ hier et ça tombe juste pour le renard roux au carré


(28 mars)

lundi 26 mars 2018

Carré 41




Carré 41

Taillis de broussaille mains en sang sarments en cisailles en venir à bout de son carré tous les jours est-ce que c’est un travail de poète privé de la prose de p.h. puis-je continuer à tracer un sillon de sel où rien ne pousse que les mots dont le Petit cherche à les voir dans les livres sans images disant mon nom n’est pas un mot et l’air sur le cou chatouillé pousse à s’asseoir tout de même au jardin tandis que sibérie grand magasin brûle ses clients assise dans un endroit du dehors venté en compagnie du chien stupide de j.f. nous regardons frissonner les bourgeons et les ombres au sol maudissant celui qui sur son tracteur vaporise la mort au verger tout est secoué le cœur aussi nous nous égarons vers une mer qui apaiserait nos blessures même si nous interrogeant sur la nécessité de ne ponctuer d’aucune manière ces carrés faits sans autre outil que deux mains nous méfiant de la technique déchirant arrachant revenant vers lascaux chauvet pour chercher les pigments de la terre et la lumière résineuse qui suffisent à créer la beauté souterraine mais là le vent disperse facilement le nuage toxique cette question de l’éthique au jardin en l’occurrence du carré a-t-elle la moindre pertinence le froid gagne le cou et plus bas je cherche des yeux ce qui dans l’herbe luisante et grasse de ce début de printemps annoncerait le poème les abeilles apportées hier sont sorties de la ruche et butinent le gros romarin bleu installées pour élire une reine tandis que cou gelé je cherche encore comment en finir avec ce carré

(26 mars)

mercredi 21 mars 2018

carré 35/printemps de sibérie à Cavaillon



Dessin SD


Bizarre que le carré pour l’instant n’ait été envisagé qu’au sol ce n’est pas sa seule expression son unique usage le mouchoir de batiste en est la preuve carré de soie négligemment noué au col ou encore de lin tout autre pièce de tissu de belle ou humble matière brodée ou non servant à se souvenir se moucher dire au revoir mais aussi glissé en pochette dans la veste dépassant telle fleur de tissu chatoyant existe aussi le carré peint et de là le pain qu’on trouve en nos régions sous le nom de pavé lui-même pavés de grès granit calcaire ou encore laiton gravé aux armes de la ville (nîmes) ou aux initiales des disparus mais là face à des interlocuteurs bienveillants nous partons en Chine puis revenons aux 7 mouchoirs et aux jours de la semaine à la SNCF parce que nos trains arrivent toujours à l’heure au moment ultime cet homme massif s’interrogeant sur le prénom à porter toute une vie est-ce qu’il agitera son mouchoir au moment du départ lorsque son travail partira comme tout s’en va nous disant quelle bonne soirée nous avons passée à parler de ces mouchoirs prénoms habitudes le jour même j’avais reçu une lettre dans laquelle il m’était raconté qu’une renarde ayant été tuée mon correspondant avait pris soin des petits sans en faire un poème tandis que vous écrivait-il comment expliquer à cet homme que pas plus que lui seulement la rousseur de la fourrure et le sang peut-être ont couru dans ces lignes sans que ce soit poème juste image juste crissement des dents juste un carré

(20 mars)

mardi 20 mars 2018

Carré 34




« Un carré de terre soigneusement encadré avec des blocs de meulière, mais totalement vide, couvert de cailloux devant la paroi d’une tonnelle, au-dessus des parterres cultivés, en même temps bien plus petit qu’eux, une jachère depuis des années, arrosée cependant avec autant d’art que d’inutilité par une gouttière, et devant lequel je me disais chaque fois : « Le cheminot a aménagé cela en mémoire de sa femme » écrit p.h. à propos d’un carré minéral dont seule la forme en fait un jardin et la terre aussi c’est étrange mais des carrés comme ça il y en a partout si on regarde de près le sol ou plutôt les trottoirs on voit des carrés de mémoire où sont gravés les noms de déportés j’en ai vu de nombreux en allemagne mais là à ce point du parcours quotidien je me demande pourquoi p.h. évoque une jardinière disparue comment cet exercice de mots et d’outils devenus nécessaires quasiment permet de telles évocations stèles couchées de laiton sur lesquelles nous marchions avec précaution incisées de noms et de dates sauf que là rien seulement des cailloux tels ceux déposés sur une tombe peut-être était-ce autrefois jardin de simples ou de fraises des bois pieusement entretenu par la morte et que le survivant ne concevait que stérile et l’eau qui y courait lors des fortes pluies automnales n’avait pour but que de rincer le carré de la poussière sèche de l’été il était comme ça aujourd’hui mais n’avait pas toujours en été si sec ce cœur rempli de larmes peut-être au secret du jardinage cachait une histoire très triste alors que le narrateur de cet étrange livre (dont je ne supportais pas qu’il finît) lui-même restait un solitaire alignant des sortes de carrés de mots comme autant de poèmes brefs tantôt parlant d’abeilles de grenouilles de renards évitant les ramasseurs de champignons se cachant d’eux assis seul en marge sur un tronc carré


(19 mars)

dimanche 18 mars 2018

carré 32


Carré 32


L’un ne lit que de la poésie crée de drôles d’outils de jardinage qu’il met ensuite dans des cadres carrés puis l’autre est entré et a demandé de la poésie rien que de la poésie je viens de perdre ma mère et il a acheté trois livres d’un coup l’oiseleur nous l’avions fait entrer dans ce paradis parce que g.c. et moi venions de perdre chacun notre mère presque en même temps et cet eden dont se pare le titre une sorte d’hommage à nos mères puissantes à leur goût d’ordonner nos vies tel le jardinier dans son potager ordonne les carrés selon qu’il y sème des salades des carottes et des choux g. et moi étions des enfants tant que nos mères étaient en vie ensuite nous avons grandi d’un seul coup comme les cèpes dont parle si éloquemment p.h. qui en une nuit triplent de volume et nous devenus grands si subitement que nos têtes se cognaient au ciel tandis que nous tentions de fuir notre chagrin alors nous avons voulu ce livre pour moins nous blesser aux arêtes des carrés que nous dessinions chacun à notre manière lui les couleurs moi les lettres crier nos cicatrices tant est violent l’attachement maternel et plus grand encore peut-être l’arrachement filial délier défaire défier ce qui longtemps a constitué la base de l’édifice et se voir à nu sans rien pour masquer la nudité de nos corps d’orphelins ceux qui se gaussent de nous savent-ils vivre comme des enfants sans mère motherless child chanson que m.j. chantait sur le tourne-disque gris et rouge offert pour ma communion solennelle à marseille dans un carton carré

(17 mars)

mercredi 7 mars 2018

D'une suite de carré, faire une chambre



Carré 22

Dixit Georges Perec ce carré ressemble à une chambre aujourd’hui ce carré-ci sera écrit en plein air sous un abri de jardin au plein vent avec des idées de germination de nourriture et de fleurs qui accompagnent le jardinier et ce mot de chambre s’il convient parfaitement au carré du jour rappelle aussi des jours noirs où on l’a utilisé de curieuse manière pour accompagner un gaz mortel et les gens qu’on poussait dedans c’était pour y mourir non pour y dormir d’un sommeil si profond qu’ils ne se réveilleraient jamais entre cette chambre d’écho et ce jardin où quelquefois nous dormons pour la sieste en été ou même comme aujourd’hui en ce presque printemps où bourgeons où graines et nous curieusement attristés par une histoire que le garagiste a racontée histoire vraie remplie de chagrins puis nous revenons au carré du jour en repensant à ces petits fromages frais que nous mangions enfants au goûter les carrés gervais qui alternaient avec les petits suisses ronds saupoudrés de sucre que notre mère nous donnait à manger chambre bien plus noire encore que la nuit (aucun carré à ce jour écrit nuitamment il en va de notre usage de la lumière comme d’autres choses solidement ancrées dans l’habitude) un mot si doux pour celui qui s’y tient pour l’amour aussi et le repos quelquefois la maladie ajouter du gaz c’est user des mots de manière mortelle et mensongère se poursuit l’aventure du carré journalier où planter tout à l’heure graines de cosmos et capucines pour égayer les autres jours