jeudi 21 septembre 2017

Un écrivain retardataire, Walser, mais aussi tous les aimés.

Être en retard.
Comme Walser.
En étant ponctuel sur le chemin.
Comme Roud.
Être en retard.
Marche en plaine.
Sans peine.

Regarder courir les livres de la rentrée en rang serré.
Se demander.
Pourquoi ce mot.
Retardataire convient si bien.
Aux gens que j'aime.
Aux poètes que je lis.
Aux amies.

Baudelaire en homme pressé, en dandy, écrivait en poète retardataire.
Benjamin avançait avec difficulté, gravissant les pentes des collines en respirant mal.
En retard ou en avance, même chose?
Un jour de plus, un de moins?
Port-Bou aurait-il conservé la trace de son passage si Walter Benjamin avait pu fuir vers le Portugal?
Le matin reste une chance.
Avant que se déclenche la suite.
Il y a dans cette fraîcheur dorée un espoir.
Puis la journée avance.
Et nous fait don de ce qui doit advenir.
L'ennui en prime.
Comment retarder sa montre alors?
Just in time, disent les anglophones.
Mais justement non, impression vive de n'être pas à l'heure.
Suis-je un écrivain retardataire?

Mais il ne s'agit pas de moi.
Seulement du temps que nous mettons à parcourir la distance imposée.
Certains rapides, Khlebnikov, d'autres plus lents.
Mais il y a d'autres questions.
Par exemple, les soldats de retour du Vietnam et d'Afghanistan, comme les rescapés des camps et des guerres du XX° siècle, n'ont rien à dire. Ne peuvent faire part de ce qui a littéralement pulvérisé le savoir qu'ils avaient sur le monde. Tout ce qu'ils avaient appris de leurs parents, de leurs maîtres, du pays dans lequel ils vivaient, des paysages mêmes, a disparu.
Que dire alors au retour?
Que dire qui ait encore une chance d'être entendu?
Tous retardataires.

La beauté du jour.
Qui s'annonce.
Dans la fenêtre.
Célèbre le présent.


Traîner les pieds dans la lumière du matin, ce serait ça, être retardataire?
Voilà peut-être l'explication.
Et d'ailleurs ma montre s'est détachée de mon poignet cette nuit.
Est restée là-haut.
Dans la chambre.
Où la nuit s'attarde.
Avec le dormeur.

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